Histoire en 12 épisodes : De juin 2011 à juin 2012
Je vais pousser un peu plus loin aujourd'hui. Reprendre l'autoroute 20 en direction de... là-bas. Je ne sais pas si je vais quelque part ou si je fuis quelque chose. Derrière moi c'est connu, c'est confortable, quelqu'un m'attend. Devant moi, venant du fleuve, le brouillard se lève. Je ne peux plus revenir en arrière. Je monte dans mon auto, je tourne la clef et je démarre.
L'autoroute achève à Rivière-du-Loup, j'enchaîne sur la route 132. L'eau du fleuve est salée maintenant et la route commence vraiment à être très belle. Je passe Le Bic et j'arrive à Rimouski. Le temps de poser mes affaires à l'hôtel et je sors. La première chose que l'on sent à Rimouski c'est l'océan. Ça aussi, ça me manquait terriblement.
Pour tout ceux qui ne le savent pas, sans doute parce qu'ils n'y sont jamais allés, la Gaspésie est le plus beau pays du monde. Je parle ici de la Gaspésie sauvage. Je parle des criques, des anses, du parc, et des villes qui s'appellent Rivière au Renard, Cloridorme ou l'Anse-au-Griffon. Il y a certainement plein de Hobbits au parc Forillon, mais ils se cachent bien, c'est tout. Forillon, une beauté à la mesure de ce coin de pays... non, mieux, à la démesure de ce coin de pays, appelle le respect. Elle dérange et appaise en même temps. J'en ai tellement besoin.
Je m'arrête acheter un cahier et je pars à la recherche d'une terrasse. J'ai pris une décision importante. J'ai décidé d'embrasser toutes les émotions qui se présentent. Les agréables et... les autres. C'est la seule façon pour moi de survivre. La seule façon pour moi de reprendre le contrôle de ma vie est de le perdre. C'est une promesse que je me fais. Je ne cacherai plus rien sous le tapis, plus de défenses, plus de bruit blanc. Allez-y, assaillez-moi, je peux en prendre. Je vous recevrai, je vous transformerai, je prendrai du trivial et du banal, puis j'essaierai d'en faire du beau. C'est mon métier après tout.
Il me reste un couplet à écrire sur « Pourquoi je chante encore ». Il est question de phare, de tourmente. Il est question d'y voir plus clair et de route en solitaire (à travers le brouillard qui flottait tout à l'heure sur la route, j'imagine). J'ai toujours écrit littéralement. Je décris ce que je vois, c'est tout.
On est au début du mois d'août 2011, je ne sais pas encore que je suis en train d'écrire un album, mais je commence à avoir des doutes. J'ai déjà remarqué que tout est bizarrement synchrone, que les coïncidences sont nombreuses. Les signes comme symboles diurnes d'un rêve éveillé sont toujours là, on se permet ou pas de les remarquer.
Paradoxalement, même si je fonce dans le brouillard, j'ai tout de même vaguement conscience d'avoir un agenda et un échéancier bien précis. Ça doit faire un sacré bail que je prépare tout ça sans m'en rendre compte. Il est temps pour moi de rentrer à Montréal. J'ai beaucoup à faire…
